Cet article résume plusieurs des sessions plénières présentées à la conférence 2016 de ECHO en Floride. Si vous n’aviez pas pu assister à la conférence, ou si vous aimeriez revoir des communications, bon nombre d'entre elles peuvent être consultés sur ECHOcommunity. Parmi d’autres exposés de 2016 qui y figurent, il y a les «légumineuses tropicales pour une culture durable sur les sols marginaux», «les systèmes silvopastoraux au Brésil» et «la culture de la microbiologie bénéfique pour l'agriculture». Des exposés présentés au cours des années précédentes sont également disponibles sur le site web.
La biodigestion: Dr Ann Wilkie
Le Dr Ann Wilkie de l'Université de Floride a parlé de la biodigestion. Ce processus produit du biogaz et résulte également en un engrais organique riche en nutriments.
Le biogaz est un mélange de différents gaz, principalement de méthane (CH4), produit par fermentation anaérobie de matière organique. Le méthane peut être utilisé d'une manière très similaire au gaz naturel. Il est particulèrement efficace et facile à utiliser pour la préparation des aliments.
Pendant la biodigestion, une grande partie du carbone dans la matière d'alimentation organique est retirée et transformée en méthane. Les éléments nutritifs, y compris N, P et K, restent dans le boilisier restant. Ces éléments nutritifs sont sous forme végétale et sont excellents pour être utilisés comme engrais. Le boilisier peut être ajouté au compost ou directement appliqué aux terres agricoles.
Un système de biogaz efficace requiert la présence d'anaérobies, de microorganismes qui peuvent décomposer la matière organique en l'absence d'oxygène. Le fumier est une bonne option comme matière de base, mais si celui-ci n'est pas accessible, d'autres options pourraient inclure la souillure du fond d'un étang, ou même la terre de jardin. Une fois le système établi, on peut utiliser n'importe quelle matière organique (par exemple des déchets alimentaires); une source permanente de fumier n'est pas nécessaire.
Le Dr Wilkie a partagé des diagrammes qui mettent en contraste les pratiques agricoles actuelles avec un système plus axé sur l'alimentation (voir Figure 5, A et B). La biodigestion prend les produits des «déchets» et les transforme en une ressource, intégrant la production d'énergie durable, la sécurité alimentaire et l'éco-assainissement. Comme le Dr Wilkie nous l'a rappelé, «Les déchets ne deviennent vraiment des déchets que lorsqu’ils sont jetés!»
La biodigestion peut se faire au niveau des ménages ou à grande échelle. Lors d'un atelier post-conférence à la ferme mondiale de ECHO en Floride, le Dr Wilkie a montré aux participants comment mettre en place un système de biogaz de taille expérimentale, pour nous familiariser avec le système et pour dissiper quelque peu notre confusion au sujet du processus. Des instructions détaillées pour la mise en place de deux types différents de biodigesteurs sont disponibles sur http://biogas.ifas.ufl.edu/ad_development/howto.asp
Accroître la résilience des petits exploitants grâce à l'agroforesterie: Dr PK Nair
Dr. P.K. Nair a aidé à fonder la discipline de l'agroforesterie. Dans son exposé en plénière, il a d'abord défini et décrit la question du changement climatique. Il a déclaré que le réchauffement de la planète a été mis en évidence de façon convaincante. Les causes font l’objet de débats, mais la plupart des scientifiques conviennent que l'activité humaine y a contribué.
La résilience est nécessaire pour les systèmes écologiques, y compris les petites exploitations. Le Dr Nair a défini la résilience comme «la capacité des systèmes écologiques à persister et à absorber le changement», ou la capacité d'un système à tolérer les perturbations (naturelles et / ou dues aux activités humaines) et à se rétablir. Le Dr Nair a souligné que 70% de la nourriture mondiale est cultivée dans des fermes d'une superficie moyenne de 2,2 hectares (5,44 acres) et a soutenu qu’il faut des méthodes agricoles durables pour protéger les ressources écologiques nécessaires pour nourrir une population mondiale croissante.
Le Dr Nair a présenté un résumé très utile des différences dans la manière dont les économistes et les écologistes perçoivent notre monde (tableau 1). En général, les économistes considèrent l'environnement comme une partie de l'économie, mais ne tiennent pas compte de la destruction économique des systèmes naturels de la terre; en revanche, les écologistes considèrent l'économie comme un sous-ensemble de l'environnement et soulignent que les activités économiques dépendent de l'écosystème terrestre. L'agroforesterie, qui fournit de nombreux services écosystémiques, peut combler le fossé économie-écologie dans les écosystèmes fragiles et contribuer à améliorer la stabilité, la durabilité et la résilience de ces systèmes. Le Dr Nair a donné de nombreux exemples de tels systèmes. Il a conclu avec une description des «systèmes de Cendrillon», qui sont des systèmes agroforestiers qui ont été pratiqués pendant une longue période mais rarement évalués scientifiquement ou mentionnés dans la littérature.
Tableau 1. Le Conflit écologie-économie | |
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Point de vue de l’écologiste | Point de vue de l’économiste |
L'économie est un sous-ensemble de l'environnement | L'environnement en tant qu’une partie de l'économie |
Toutes les activités économiques, voire la vie, dépendent de l'écosystème terrestre | La théorie économique n'explique pas la destruction des systèmes naturels de la terre causée par l’économie |
Reconnaît les limites, les contraintes et les cycles – éléments nutritifs, eau ... | Travaille de façon linéaire ou curviligne |
Les déficits écologiques signifient que nous prenons ce qui appartient (nous ne l’empruntons pas) aux générations futures | Les déficits économiques signifient que nous empruntons les uns aux autres |
Source: Dr. P.K. Nair, Exposé lors de la séance plénière de la conférence |
Cultiver la pluie: Brad Lancaster
Brad Lancaster est l'auteur de Rainwater Harvesting for Drylands and Beyond, un guide en deux volumes sur les systèmes d'exploitation durable de l'eau, avec un troisième volume en cours. Tout en racontant l'histoire d'un mentor Zimbabwéen (M. Phiri), Lancaster a partagé huit principes pour l'intendance des ressources en eau.
En dépit des sécheresses fréquentes, et sans l'avantage de ruisseaux entrants, M. Phiri a transformé sa ferme sèche, érodée de 3 hectares en un lieu d'abondance. Lancaster a repris cette citation de Phiri: « Tout le monde plante des arbres, mais presque personne ne plante l'eau."
Les principes présentés par Lancaster ne requièrent pas la technologie moderne; ils peuvent être mis en œuvre simplement en utilisant judicieusement les ressources disponibles gratuitement dans la nature. Les huit principes de collecte d'eau présentés par Lancaster sont:
- Commencez par une observation longue et réfléchie.
- Commencez par le haut ou le point élevé de votre bassin versant et travaillez du haut vers le bas.
- Commencez petit et simple.
- Étendez le débit d'eau afin qu'elle s’infiltre dans le sol.
- Prévoyez toujours un itinéraire de débordement et gérez cette eau de trop-plein comme ressource.
- Maximisez la couverture végétale biologique.
- Maximisez les relations bénéfiques et l'efficacité en «empilant des fonctions».
- Réévaluez continuellement votre système.
Lancaster a décrit des techniques spécifiques pour mettre ces principes en pratique. Au cours d'un atelier post-conférence, il a également expliqué comment comprendre le parcours du soleil dans un site et comment placer les plantes et orienter les bâtiments afin de tirer le meilleur parti possible du soleil et de l'ombre.
On peut en apprendre davantage en consultant l’exposé de Lancaster lors de la conférence, en visitant son site web (www.HarvestingRainwater.com), ou en achetant ses livres (sur le site web de Lancaster ou à la librairie de ECHO [www.ECHObooks.org]).
La Linguistique Appliquée dans l’agriculture: Dr. David Ross
Chaque personne a une vision du monde - une perspective unique à travers laquelle il ou elle interprète le monde. Lorsque des visions très différentes du monde se croisent (par exemple, pendant le travail de développement interculturel), des malentendus peuvent se produire si une partie n'est pas sensible à la vision du monde de l'autre. David Ross, président de l'Institut universitaire de linguistique appliquée de Dallas, au Texas, a expliqué dans son allocution en plénière, à travers des études de cas et des documents publicitaires, comment la linguistique peut affecter le développement agricole.
La linguistique appliquée est un «champ interdisciplinaire de linguistique qui identifie, étudie et offre des solutions aux problèmes de la vie réelle liés à la langue». La linguistique appliquée s'étend à plusieurs domaines d'étude, y compris la philosophie, l'anthropologie, la langue et l'éducation, et cherche à renforcer la compréhension et à promouvoir une sensibilité vis-à-vis des différentes visions du monde. Le tableau 2 décrit les réponses de la vision du monde de chaque communauté à certaines questions fondamentales et les facteurs sociétaux auxquels elles se rapportent:
Tableau 2. Les Fondements de la vision du monde. | |
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Question | Facteur sociétal |
Comment pouvons-nous survivre? | Économie |
Qui sommes-nous et d'où venons-nous? | Parenté |
Comment interagissons-nous avec les autres? | Structure sociale |
Comment contrôlons-nous le comportement? | Politique |
Comment interagissons-nous avec le surnaturel? | Religion |
Source: Dr. David Ross, Exposé lors de la séance plénière de la conférence |
Parfois, des projets agricoles bien intentionnés échouent en raison de l'insensibilité ou de l'intolérance à l'égard des différences dans les visions du monde. Le Dr Ross a donné des exemples concrets de certains de ces projets. Il a également expliqué comment des différences dans les valeurs culturelles peuvent miner un projet, tels que:
- La promotion des intérêts personnels d’agriculteurs individuels lorsque les intérêts de la communauté sont de la plus haute valeur (facteur politique)
- La promotion des intérêts personnels d’agriculteurs individuels lorsque la conformité est d’une valeur plus élevée (facteur de prise de décision communautaire)
- La non prise en compte des associations historiques ou religieuses dans les solutions proposées (facteur religieux)
Le Dr Ross a indiqué qu'un principe fondamental dans l'application de la linguistique au développement consiste à prendre le temps d'apprendre la langue et la culture (y compris la vision du monde), pour mieux comprendre et aider les communautés à répondre aux besoins qu’elles ressentent. Le Dr Ross a également prévenu qu’il faut réfléchir attentivement à tous les documents publicitaires distribués, et a expliqué la différence entre l'analphabétisme (incapacité de lire ou d'écrire) et l'analphabétisme fonctionnel (la capacité de lire et d'écrire des phrases simples avec un vocabulaire limité, mais l'incapacité de le faire assez bien pour gérer les tâches quotidiennes de la vie et d'emploi).
Citer comme suit:
ECHO Staff 2017. Conférence Internationale 2016 de ECHO sur l’Agriculture. Notes de développement de ECHO no 134