Par: Robert Sanou
Publié: 01/08/2017


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Figure 1. Champ traditionnel de mil. Source: le personnel de ECHO Afrique de l'Ouest

Faire Face Aux Changements Climatique

L'un des secteurs les plus menacés par les changements climatiques en Afrique de l'Ouest est l'agriculture. Depuis ces dernières années, elle subit de sévères dommages. Tantôt il s'agit d'inondation, tantôt de sècheresse, de grands vents, de froid inattendus. De nombreuses initiatives sont entreprises en vue d'une adaptation de l'agriculture aux changements climatiques.

S'il est vrai que les changements climatiques se présentent comme un fléau, des aléas au-dessus de la capacité des hommes, il n'est pas moins vrai que l'une des solutions c'est de développer des stratégies en vue d'une réadaptation de nos braves agriculteurs aux changements climatiques. Le FFF se présente comme étant une option sérieuse capable d'aider nos agriculteurs.

Brève définition des concepts

Le "Foundation for Farming" est souvent traduit en Français par Les Fondements de l'Agriculture qui a son origine dans la méthode "Farming God's Way" (Agriculture Selon le Principes de Dieu). Dans le Sahel il est surtout connu sous le nom de "Zaï" ou les "trous agricoles". Dans la pratique, le FFF est beaucoup plus exigeant.

En quoi consiste le FFF ?

La technique a été mise à jour par un fermier Zimbabwéen du nom de Brian Oldreive qui, partant du fait que Dieu a tout prévu pour la terre, conclura que l'Homme est à la source de la dégradation de son environnement. L'agriculture est bien possible à condition que nous la fassions selon le plan de Dieu, d'où l'appellation de "Farming God's Way" (Agriculture Selon le Principes de Dieu). Elle consiste à ne pas labourer le sol, à y creuser des trous d'environ 20 centimètres de diamètre et de 15 cm de profondeur, espacés d’environ 50 à 70 centimètres selon la variété cultivée, d'y mettre de la fumure organique avant de semer. Après les semis, il est conseillé de couvrir les poquets avec de la paille. Les jeunes plantes seront démariés de sorte à n'y laisser que deux plantes par poquets. Il est conseillé d'éliminer celui du milieu ou le plus petit. 

Pour pratiquer le FFF, le paysan n’a besoin que de trois  outils : la daba pour faire les trous, la corde pour tracer les limites et un bâton pour mesurer les espacements.

La position des tas de terre doit tenir compte de la pente du champ pour bloquer le passage de l’eau.

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Figure 3. L'apprentissage de FFF. Source: le personnel de ECHO Afrique de l'Ouest

Intérêt du FFF pour les petits fermiers au Sud du Sahara

Plusieurs pratiques telles que le Zaï sont faites dans la sous-région depuis plusieurs années mais le FFF est assez récent. Au Burkina Faso par exemple, c'est seulement après le forum de ECHO en 2010 qu'il a été mis en œuvre par certains des participants. Dès lors, la pratique n'a cessé de se répandre.

Intérêt sur le plan écologique

Contrairement à la pratique répandue en agriculture qui consiste à labourer le sol, le FFF déconseille le labour. Le labour a certes des avantages mais les inconvénients ne sont pas non plus à négliger. Parmi tant d'autres on citera le lessivage du sol, son appauvrissement, et son exposition aux intempéries. En la retournant chaque année, les eaux de ruissellement ne font qu'emporter les parties nutritives du sol. Celles qui y échappent sont détruites par le soleil. La même opération se répète chaque année. Le FFF au contraire, ne fait qu'un trou, nourrit le sol en y ajoutant de la fumure organique et le protège en le couvrant de paille. Il est à signaler que les mêmes poquets peuvent être utilisés les deux années suivantes sans besoin d'y ajouter d'autres engrais surtout si l'on peut faire la rotation de semis.

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Figure 4. La méthode FFF. Source: le personnel de ECHO Afrique de l'Ouest

L'autre intérêt écologique du FFF réside dans la récupération des sols dégradés. Dans la plupart des villages, les champs s'éloignent au fil des années des habitations parce que les sols se dégradent jour après jour et les petits fermiers ont tendance à aller plus loin pour défricher de nouveaux terrains. Les terrains aux alentours du village sont presque incultes. Avec la pratique du FFF, ces sols "impraticables" sont réutilisables. C'est ce défi qu'un des partenaires de ECHO a relevé dans son village. Les sols à la sortie du village de Kouka ont été abandonnés par tous, parce que complètement lessivés par les eaux de ruissellement et le surpâturage. Le sol était devenu latéritique. C'est un de ces terrains qu'Emile a choisi pour y produire ses trois hectares de maïs. A ses débuts, tout le monde le traitait de "fou" parce que tout le monde croyait qu'il ne pouvait rien produire sur un terrain aussi dénudé. Il a pratiqué le FFF et les résultats sont incroyables. Le FFF pourrait résoudre la question de la disponibilité des sols cultivables parce qu’il permet de restaurer les sols les plus dégradés et pourrait permettre aux petits fermiers de les réutiliser. Le FFF enrichi le sol, le restaure et pourrait être d’une grande utilité sur le plan écologique. Voici ce que le FFF peut donner sur un terrain complètement inculte.

Intérêt économique

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Figure 5. FFF: Emile dans son champ. Source: le personnel de ECHO Afrique de l'Ouest

Sur le plan économique, le prix du labour de l'hectare varie entre 20 000 FCFA et 25 000 FCFA au Burkina Faso. Avec la pratique du FFF, l'on n'a pas besoin d'amener un tracteur ou des bœufs pour labourer le champ. Il suffit d'être de préférence deux pour préparer un hectare suivant la méthode FFF par jour. La marge à économiser est tellement évidente! L'autre aspect de l'intérêt économique du FFF réside dans l'achat des engrais. Au Burkina Faso, les techniciens conseillent pour un champ de maïs d’un hectare, 04 sacs de l'engrais NPK et 01 sac  de l'engrais urée. Le coût moyen d'un sac de NPK est de 13 000 FCFA par sac contre 17 500 FCFA pour l'urée. Un calcul rapide nous montre que pour l'entretien d'un hectare en engrais, le paysan doit dépenser 56 000 FCFA. ECHO dispense des formations qui permettent de produire du compost bio en moins d’un mois en utilisant uniquement des matériaux locaux.

Force est de reconnaitre que le coût élevé de l'engrais est l'une des causes d'appauvrissement de nos braves agriculteurs. Dans le cas du FFF, on n’utilise que le compost que le paysan peut produire lui-même presque gratuitement (voir article comment préparer le compost).

Certains des producteurs que nous avons rencontrés utilisaient certes la fumure organique qu’ils épandaient dans tout le champ. Ils utilisaient en moyenne 16 charretées de fumure organique par hectare. Mais avec la formation en FFF, l’engrais n’étant utilisé que dans les poquets, ils n’ont besoins que de quatre charretées par hectare soit le quart de ce qu’ils utilisaient auparavant.

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Figure 7. FFF: Siméon Keita dans son champ de coton. Source: le personnel de ECHO Afrique de l'Ouest

Intérêt sanitaire

Sur le plan sanitaire, les productions agricoles du FFF sont à 100% bio sans engrais chimique tandis que les productions classiques sont à base d’engrais chimiques comportent beaucoup de risques sanitaires. Nul n’ignore que beaucoup de maladies de nos jours sont liées à la consommation excessive de produits chimiques dans notre alimentation.

Intérêt sur le plan du rendement agricole

Notre étude a permis d'observer l'évolution comparée d'un champ FFF et d'un champ traditionnel utilisant de l'engrais chimique. L'expérience fait ressortir beaucoup de différences. Dès l'épiaison, le champ FFF pousse avec des plantes assez solides tandis que le champ traditionnel a souvent besoin de l'apport de l'engrais chimique avant de se ressaisir. Pendant les trois semaines suivantes, l'expérience a montré que le champ traditionnel ayant utilisé l'engrais chimique, croît plus rapidement que le champ du FFF. Mais à partir d'un mois, le champ FFF le rattrape et le dépasse. A la floraison, le FFF fleurit plus et donne beaucoup plus de fruits. Nous avons vécus cette expérience sur cinq champs, deux de maïs, deux de coton et un de sorgho. Les résultats sont approximativement les mêmes.

Un fermier qui respecte les normes du FFF produit pratiquement le double de celui qui utilise l’engrais sur les mêmes superficies. Dans certains champs des partenaires, on a pu constater la production de 5 à 6 tonnes de maïs par hectare, tandis que les champs utilisant l’engrais chimique dépassaient très rarement 3 tonnes par hectare.

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Figure 8. Comparaison d'un champ traditionnel (à gauche) et le FFF (à droite). Source: le personnel de ECHO Afrique de l'Ouest

Intérêt dans lutte contre les changements climatiques : La capacité de résistance aux intempéries

L'autre intérêt de notre étude a concerné la capacité de résistance de deux champs. Dans l'un des cas, la poche de sècheresse a été très fortement ressentit par tous les champs voisins dont les feuillages ont commencé à sécher tandis que le champ FFF supportait très bien la sècheresse. En moyenne, un champ bien préparer peut supporter jusqu'à trois semaines de sècheresse. Une autre leçon que nous avons tirée de l'étude est le cas particulier des fermiers dont le champ est dans une zone inondable. Ces trois dernières années, il n'a presque rien récolté à cause des inondations dont les effets sont plus néfastes lorsque le champ est labouré. En cette année, il a expérimenté le FFF sur le même terrain. Le champ a pu résister aux inondations et il fera une des meilleures récoltes depuis ces trois dernières années. La pratique du FFF, en effet, du fait qu’elle se mène dans les bas-fonds non labourés rend les plantes plus fermes et plus résistantes en cas d’inondation du terrain.

Dans les champs de coton, la différence semble être plus grande que dans les champs de maïs et de sorgho.

En moyenne, l'étude comparée montre qu'un champ FFF produit 2 à 2,5 fois plus que le champ traditionnel.

La beauté du champ de FFF

Dans un champ de FFF, tout est si bien ordonné, nous confiait un producteur. En effet, le champ de FFF est si bien aligné, qu'il rend le travail facile à l'agriculteur.

Au vu de tout ce qui précède, force est de reconnaitre que le FFF constitue un véritable potentiel, une piste à exploiter en vue de l'amélioration des conditions de travail des petits fermiers. On est tenté de dire après cette recherche, que plus on recherche, plus on découvre et mieux on peut l'adapter à nos réalités climatiques. C'est véritablement à notre avis, une alternative pour la lutte contre les changements climatiques.
 


 


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